Soirée du 7 février 2024 à la Machinerie

Une cinquantaine de personnes à cette soirée autour de la projection du film « Les Sommets de la Dignité ». Un super buffet avait été préparé par Les Mets Connus », projet né au sein de « Point d’eau », https://www.lesmetsconnus.org/ Intervention de Michelle C. pour présenter la soirée ; de Max, responsable du lieu, ainsi que de Monique qui a présenté le Collectif. La quantité de questions a montré l’intérêt des présents.

Soirée du 24 novembre au BAR A THYM

Belle soirée organisée par Michelle. La projection du film LES SOMMETS DE LA DIGNITÉ (Prix du Jury du Syndicat des Guides de Haute Montagne) a permis un riche débat sur la situation de Djahfar, vedette du film, mais aussi de Mohamed, Victor et Abdel, emmenés par Candice. Cet accompagnement de nos sœurs et frères en humanité nous a permis de vivre une autre réalité, celle de leur parcours. Merci aussi pour les témoignages de Monique et Christian sur le déroulement des accompagnements du Collectif, et l’évocation de Wanda. Echanges enrichis par la présence de Clément, des PFI. Encore merci et bravo à Michelle pour cette initiative et cette organisation.

Les Trophées du Funéraire

« des initiatives pour accompagner et soutenir tous les deuils dans leur diversité »

Pour sa 3ème édition les Trophées du Funéraire, initiés par la plateforme d’assistance Previseo Obsèques, filiale du Crédit Agricole, ont récompensé ce 9 novembre 2023 à Paris dix initiatives dans cinq catégories : l’innovation, la création artistique, l’écologie, la solidarité et l’inclusion, parmi les 119 candidatures. Lancés en juillet dernier, ces trophées révèlent l’exceptionnelle richesse des initiatives qui fleurissent dans notre société autour de l’accompagnement du deuil, des rites funéraires et du rapport à la mort. Cette année, Previseo s’est entouré dans sa démarche de deux partenaires : un réseau d’incubateurs de l’Economie Sociale et Solidaire : le « KIIF » et de la Fédération Nationale du Funéraire. Quant au jury, il était présidé par la jeune anthropologue du funéraire de l’université de Tours, Manon Moncoq.

Parmi les lauréats de la catégorie Inclusion, le jury a décerné deux prix spéciaux décernés à «Goutte de vies » à Toulouse et à l’association « les amis du Collectif Morts de rue et Personnes Isolées Grenoble », qui s’occupent de la sépulture des personnes mortes dans la rue.

Cérémonie du 1er novembre 2023

Comme chaque année, ce 1er novembre 2023, nous étions à l’entrée des cimetières du Petit et du Grand Sablon pour accueillir les personnes venues fleurir les tombes de leurs proches. Parfois surpris que ce ne soit pas pour leur demander de l’argent, mais plutôt pour leur offrir une fleur, « Une fleur contre l’oubli », en les invitant à aller la déposer sur une des tombes du carré commun. C’était bien-sûr l’occasion de les informer de l’existence du carré commun, du collectif et de ses actions. Une fois au carré commun, d’autres membres du collectif répondaient au parfois nombreuses questions que la découverte de ce carré suggérait.

Ensuite, nous nous sommes rendus successivement au carré commun du Grand Sablon, puis à celui du Petit Sablon, pour des cérémonies d’hommages.

Pierre a mené ces cérémonies,

Elizabeth et Françoise ont lu les noms des 34 personnes accompagnées depuis un an,

Notre ami poète Georges a dit quelques poèmes.

Des élus étaient présents :

Pour la Mairie de Grenoble, Mr Emmanuel Carroz, adjoint, qui a pris la parole, ainsi que Mr Jérôme Soldeville, conseiller municipal.

Pour la Mairie de La Tronche, Mr Jean-Luc Petitclerc, premier adjoint, nous a lu ce magnifique texte de Mr Bertrand Spindler, excusé.

« Pourquoi enterrons-nous les morts ?

Enterrer. Mettre en terre. Inhumer dit-on également. Mettre dans l’humus.

Il y a ce jeu des mots entre humus et humain. Ce jeu des mots qui existait déjà dans l’origine latine de ces mots : houmous et homo.

Ce jeu des mots qui nous vient de très loin dans l’histoire et la civilisation, puisque dans le mythe du premier homme, Adam, Adam veut dire le terreux, celui qui vient de la terre, celui qui est exhumé.

Exhumés par notre naissance. Inhumés par notre mort. Exhumés, tirés de l’humus pour devenir humains. Puis y retourner.

Pourquoi enterrons-nous les morts, ou pourquoi posons-nous les cendres dans des colombariums ?

Pour qu’ils restent auprès de nous. Pourquoi veulent ils rester auprès de nous ? Parce qu’ils veulent nous parler. Parce qu’ils veulent nous rappeler à nos devoirs. Nos devoirs de prendre soin des autres et de prendre soin d’eux. Pour qu’ils puissent continuer à veiller sur nous.

Nous savons la puissance d’agir des morts sur des personnes, sur des communautés, sur des peuples et des civilisations.

Alors une personne morte sans famille, isolée, quelle est encore sa force, quelle est encore sa puissance, que nous dit-elle encore ?

Eh bien, une personne isolée, à qui l’on ne parlait plus, cette morte seule nous parle encore à nous, nous qui sommes là. Elle nous dit l’humanité à laquelle nous appartenons comme elle. Elle nous dit le courage qu’il faut parfois avoir pour être des êtres humains. Le courage de ne pas désespérer quand le monde est en guerre et que les chemins de la paix semblent inaccessibles.

Le maître de la cérémonie dit aux accompagnants du mort d’avoir du courage. Je ne l’entends pas comme le courage qu’il faut pour prendre le deuil d’une personne que nous connaissions, d’une personne que nous chérissions. Les personnes enterrées ici, nous ne les connaissions pas, et dans notre paysage intime, elles ne vont pas nous manquer.

Non, le courage qui nous est dit, c’est le courage, c’est l’encouragement à persévérer dans l’accompagnement que nous faisons, au nom de l’humanité entière, l’encouragement à continuer à nous rassembler devant les personnes isolées, à continuer à donner notre présence. Bon courage pour notre présence. »

1er novembre 2023, une fleur contre l’oubli

Chacune, chacun était quelqu’un

Depuis plusieurs années, le collectif Morts de rue et Personnes isolées propose « une fleur contre l’oubli » aux personnes qui viennent, en ce jour de mémoire, honorer leurs morts.

Une fleur à déposer sur une tombe du carré commun.

Aux carrés communs de Grenoble et La Tronche, sont enterrées les personnes décédées dans la rue ou isolées.

Carré commun ? Non pas une fosse commune, collective, mais un carré commun où chaque personne a sa propre tombe. Chaque personne y est identifiée, et non pas anonyme.

Depuis le 1er novembre dernier, le collectif a accompagné les obsèques de 34 personnes isolées, ou mortes dans la rue. Ce nombre est bien au-dessous de la réalité, car il est difficile de recenser les disparus.

Déposer une fleur le 1er novembre sur ces tombes ; ce petit geste dit que nous appartenons toutes et tous à la même famille et que personne ne doit être oublié en ce jour du souvenir.

Le collectif « Morts de rue et Personnes isolées » invite celles et ceux qui le souhaitent à venir le 1er novembre à 15h au Cimetière du Grand Sablon, fleurir ces carrés communs et témoigner de notre solidarité lors de l’hommage qui sera rendu aux femmes et hommes inhumés en ces lieux.

Dire non à l’oubli et oui à notre humanité.

Cérémonie du 1er novembre 2022

Dès 9h, à l’entrée des cimetières du Grand et du Petit Sablon, une douzaine de membres du collectif se sont relayés, s’adressant aux personnes venus se recueillir devant les tombes de leurs proches.

Ceci pour les informer (ou leur rappeler) l’existence des carrés communs et leur proposer de leur offrir une fleur à aller déposer sur l’une des tombes de personnes décédées à la rue ou dans l’isolement. Cela a été l’occasion de nombreux échanges.

A 15h, nous nous sommes tous dirigés vers le carré commun du Grand Sablon, accompagnés de Marine Legendre, adjointe de Mr Spindler, maire de La Tronche, et de Georges, poète, qui est présent à nos côtés lors de tous les hommages.

Recueillis en silence devant ce carré commun, Pierre a pris la parole :

« Membres du collectif Morts de Rue et Personnes Isolées, nous voici réunis comme chaque année en ce 1er novembre. Réunis pour la trentième fois depuis un an, mais aujourd’hui, fait inhabituel, non pas autour d’un cercueil, mais sur le Carré Commun de ce cimetière. Réunis avec vous, membres de municipalités, d’associations ou, simplement, membres de la communauté humaine à laquelle nous appartenons tous.

Peut-être, certains d’entre vous, comme certains de ceux auprès desquels, depuis ce matin, nous nous sommes manifestés à l’entrée de ce cimetière, se demandent : Qui sont donc ces gens ?

En effet, qui sommes-nous pour nous proposer ainsi, par nos présences lors de cérémonies de mise en terre, à des personnes qui n’en ont pas fait la demande ? Qui sommes-nous à vouloir rompre la solitude qui constitua peut-être les derniers moments de leur vie ? La solitude et l’isolement nous font-ils si peur, nous rendent-ils si malheureux que nous voulions briser ainsi et comme annuler par notre présence ce qui constitua la fin de l’existence de ces personnes ? En quoi cela nous est intolérable de laisser leur corps s’engloutir dans l’oubli sans que nous n’ayons tenté de barrer le chemin à leur délaissement ?

Eh bien, nous sommes des amis ! Présents dans la solidarité et le soin que l’on se prodigue entre amis. Pareils à ces amis qui nous quittent le soir, après un repas pris en commun, auxquels nous disons en nous séparant à regret : « Allons, tu ne peux pas partir comme ça ! Prends cette veste, tu risques d’avoir froid. » Ou bien « Je vais te faire un sandwich pour la route. » Ou bien encore : « As-tu suffisamment sur toi en cas d’imprévu ? Et tu m’appelles si tu as un problème… »

Notre collectif représente cette façon « d’être avec », même dans l’éloignement. Même dans la séparation de la mort. Par ce geste si minimal et pourtant essentiel de nous détourner de notre propre vie le temps de ses obsèques pour rendre témoignage et hommage à un inconnu, une inconnue. Inconnu aux autres et pourtant devenue proche par ce mouvement de tout notre être social, spirituel, affectif. Inconnu dont l’annonce des obsèques est venue nous alerter, nous tirer de nos occupations habituelles, nous dire le monde comme il est parfois, sauvage, si sauvage, et nous demander de le réparer. Et, quoique ne connaissant rien de cet inconnu, de son histoire, en venant dans ce cimetière, chacun de nous visite alors ce qu’a pu être son sentiment d’esseulement. Chacun mu par des valeurs, des besoins, des intérêts différents, mais nous retrouvant dans la solidarité d’une société humaine redevenue normale. »

Puis, il a invité Elisabeth et Françoise à lire à haute voix les noms des trente personnes accompagnées par le collectif depuis un an :

« MARTINEZ Michel, novembre 2021

KAULINS Alvis, décembre 2021

DROGO Albert, décembre 2021

FRANCOIS Lenny, décembre 2021

LEGENDRE Hélène, janvier 2022

LANDAULT Christia, janvier 2022

BLADET Christian dit Papy, février 2022

MERLIN François, février 2022

RIFFIN Josette, février 2022

KIEFFER François, mars 2022

STRINGOS Constan, mars 2022

ZAKARAIA TSALIA, mars 2022

PORTET Franck, mars 2022

CLOT Monique, avril 2022

REVOL Bernard, mai 2022

FARES Gabriel, mai 2022

MAUGE Michèle, juillet 2022

KNAPP Romain, juillet 2022

WAKIM Mourched, août 2022

CHASTANG Henri, août 2022

RUPH Georges, août 2022

VERQUIN Pascal, août 2022

BOZONNIER Armand, août 2022

FOUGEROUSSE Martine, septembre 2022

FORTIER Agnès, septembre 2022

OKON Paulina, septembre 2022

GUYON André, octobre 2022

VIVIEN Jean-Pierre, octobre 2022

GAMBAU Jorge, octobre 2022

BECK Tornac, octobre 2022 »

Ensuite, Georges nous a dit quelques poèmes de sa composition.

Enfin, silencieusement, nous avons tous déposé des fleurs sur les tombes de ce carré commun.

Après cela, nous nous sommes dirigés vers le carré commun du Petit Sablon, le carré 7.

Au cours de ce recueillement, Pierre a redit son texte, puis, Madame Legendre a pris la parole :

« Le 1er novembre, jour férié de la République, est devenu le jour où l’on se souvient des morts. L’usage populaire a transformé deux fêtes religieuses catholiques, la fête de tous les saints le 1er novembre, et le jour des défunts le 2 novembre. Le mot Toussaint a perdu son sens religieux, il est devenu profane et son étymologie même n’est plus signifiante quand on l’emploi.

Cet usage populaire et profane de se souvenir des morts, d’honorer les morts, symbolisé par les chrysanthèmes, s’est répandu à partir du fleurissement des monuments aux morts le 11 novembre, après la fin de la première guerre mondiale. Jour des défunts, souvenir de l’armistice, souvenir des morts pour la France, souvenir des morts de chaque famille, floraison tardive des chrysanthèmes en ce début d’automne, où les jours raccourcissent. Tout cela nous incline à la nostalgie et à la méditation sur le temps qui passe et la mort qui nous attend. De la Toussaint : honorer tous les saints, on est passé à : Toussaint, tout nos morts sont à honorer, tout nos morts sont nos saints.

Tous nos morts. Non seulement ceux de nos familles, mais aussi ceux qui n’avaient plus de famille. Nous sommes ici dans ce qu’on appelle le carré commun, qui accueille les corps des personnes mortes sans ressource ou sans famille. Carré commun. Commun au sens de bien commun, partagé par tous. Commun au sens d’ordinaire, d’égal pour tous. Non pas une fosse commune, collective, mais un carré commun où chaque personne à sa propre tombe. Chaque personne y est identifiée, et non pas anonyme. Ce carré commun a été récemment nettoyé et réaménagé par les services de la commune. L’herbe va y pousser, pour en faire un espace à la fois collectif, la pelouse, et individuel, les planches avec les noms.

Le collectif et l’individuel. Singularité fondamentale de chaque personne humaine, mais le miroir de cette singularité, c’est la solitude. La singularité, mais aussi la solitude, c’est ce qui nous caractérise, depuis notre naissance jusqu’à notre mort. Mais nous sommes aussi des êtres sociaux, nous avons besoin des autres pour grandir et pour vivre en société. A cette solitude vient en contrepoint le collectif. Vous êtes membres du Collectif des morts de rue et isolés, beau nom de collectif pour s’occuper de celles et ceux que la mort a saisi dans la solitude. Le collectif pour les isolés.

Il n’est plus jamais de solitude pour ceux qui sont morts. Ce qui nous émeut et ce qui nous rassemble ici, c’est cette solitude qui n’en est plus une.

Le rôle de la famille ou des proches d’une personne qui vient de mourir est de s’occuper des funérailles. Cela fait partie de ce travail de deuil nécessaire : prendre encore soin de celui qui est mort, s’occuper de son corps. Quand une personne est isolée, il n’y a personne pour le faire. C’est ce rôle de soin ultime, d’accompagnement ultime, que jouent les bénévoles du Collectif Morts de rue et isolés. Prendre soin, gratuitement, prendre encore soin de celui ou celle qui vient de mourir, comme on le ferait pour un proche.

Je vais dire le nom de ceux qui ont été enterrés ici, depuis un an, et dont le nombre augmente, chaque année.

Christian LANDAULT

Slobodan SULIC

Nemesio RECIO DOMINGUEZ

Hassen DJELLAB

Josette RIFFIN

Françoise KIEFFER

Tsiala ZAKARAIA

Christophe ARRIVÉ

Monique GERY

Bernard REVOL

Gabriel FARES

Denis BLANC (N°33)

Michèle MAUGE

Romain KNAPP

Mourched WAKIM

FORTIER Agnès

Paulina JIMOH (née OKON)

Alain SPOSITO

Jorge GAMBAU

Je vous remercie, vous qui, par votre présence, témoignez collectivement que toutes les personnes enterrées ici appartenaient à la communauté universelle des humains. »

Après cela, avant de nous disperser, nous nous sommes dirigés vers le carré 8, celui des enfants, où nous avions accompagné, en mai 2021, le petit Gabriel.

1er novembre 2022, une fleur contre l’oubli

Chacun, chacune était quelqu’un.

Depuis plusieurs années, le collectif « Morts de rue et Personnes isolées » propose une fleur contre l’oubli aux personnes qui viennent, en ce jour de mémoire, honorer leurs morts. Une fleur à déposer sur les tombes du carré commun.

Aux carrés communs de Grenoble et La Tronche, sont enterrées les personnes décédées dans la rue ou isolées.

Carré commun ? Non pas une fosse commune, collective, mais un carré commun où chaque personne a sa propre tombe. Chaque personne y est identifiée, et non pas anonyme.

En 2022, le collectif a accompagné 23 personnes isolées, ou mortes dans la rue, lors de leurs obsèques à Grenoble. Ce nombre est bien au-dessous de la réalité, car il est difficile de recenser les disparus.

Déposer une fleur le 1er novembre sur ces tombes ; ce petit geste dit que nous appartenons toutes et tous à la même famille et que personne ne doit être oublié en ce jour du souvenir.

Le collectif « Morts de rue et Personnes isolées » invite celles et ceux qui le souhaitent à venir le 1er novembre à 15h au Cimetière du Grand Sablon, fleurir ces carrés communs et témoigner de notre solidarité lors de l’hommage qui sera rendu aux femmes et hommes inhumés en ces lieux.

Dire non à l’oubli et oui à notre humanité.

Cérémonie du 1er novembre 2021

Ce 1er novembre 2021, de 9h à 15h, à l’entrée des cimetières (Petit et Grand Sablon), des membres du collectif proposaient aux personnes venues se recueillir sur la tombe de leurs défunts d’accepter une fleur pour aller la déposer sur une tombe du carré commun. A cette occasion, les échanges ont été pour la plupart l’occasion de découvrir l’existence de ces carrés communs, et aussi de notre collectif.

A 15h, un premier recueillement a eu lieu au carré commun du cimetière du Grand Sablon. Monique a pris la parole :

Bonjour à toutes et à tous !
Nous sommes réunis ici près des Carrés Communs du Petit et du Grand Sablon pour honorer la mémoire de toutes les personnes que nous avons accompagnées.
Nous avons le plaisir et l’honneur d’accueillir M. Bertrand Spindler, maire de La Tronche et M. Emmanuel Carroz, représentant M. Éric Piolle qui s’est excusé auprès du Collectif pour son absence.
Ces personnes que nous avons accompagnées sont mortes à la rue ou des conséquences d’une vie à la rue, mais également des personnes isolées décédées sans famille ni proches.
Depuis le 1er novembre 2020 , nous comptons 23 personnes qui reposent ici ou – faute de place – dans des tombes disséminées dans ce cimetière, ou d’autres cimetières de Grenoble ou de la région grenobloise.
Honorer la mort de ces personnes, c’est reconnaître leur vie.
Elles ne sont plus enterrées comme des chiens, expression peut-être plus très juste maintenant vu comment certains propriétaires prennent soin de leur animal de compagnie.
Quelle tristesse de mourir sans tenir la main d’un proche, d’un ami, de quelqu’un ! Heureusement, il existe des associations qui peuvent être présentes en cette fin de vie . Car , il faut surtout refuser l’indifférence. Notre Collectif est là pour montrer qu’on ne les oublie pas et pour reconnaître à ces défunts toute la dignité qu’ils méritent.
Et notre action ne s’arrête pas là. Pour chaque mort de rue ou personne isolée, nous assurons une présence à la chambre mortuaire, puis au cimetière. Devant leur cercueil, nous lisons des textes, parfois écrits spécialement pour le défunt, nous allumons une bougie et déposons des fleurs jusque dans sa tombe.
Nous avons décidé récemment de faire des compte-rendus après chaque accompagnement, en y incluant les textes lus, les fleurs déposées, le temps qu’il fait, les personnes parfois présentes, comme des voisins ou des aides. Ces compte-rendus serviront à faire le récit des funérailles aux proches qui apprendraient ce décès par la suite. Notre Collectif est plus que jamais décidé à ne pas abandonner ces personnes, à ne pas les oublier et à les honorer tout au long de l’année et plus particulièrement, en ce premier novembre et au début de chaque mois de juillet.
Aujourd’hui, on se souvient d’eux et, en leur mémoire, nous allons écouter l’évocation de leur noms et de leur lieu de sépulture.

Cette liste des personnes seules décédées depuis un an a été lue par Elisabeth et Françoise. Ensuite, Georges déclama deux poèmes de sa composition, et enfin, avant d’aller déposer nos fleurs sur les tombes, une minute de silence a été observée.

Ensuite, un second recueillement a eu lieu au carré commun du cimetière du Petit Sablon, Mr Spindler, Maire de La Tronche, a pris la parole :

La ville de La Tronche est une ville accueillante. Avec ce grand hôpital sur son territoire, elle accueille les naissances. Elle inscrit le nom des nouveaux nés dans ses registres. Elle accueille aussi les décès. Elle inscrit le nom des morts dans ses registres. Actes fondamentaux de la vie, qui doivent être accompagnés dans le respect et la dignité.

Le 1er novembre, jour férié de la République, est devenu le jour où l’on se souvient des morts. L’usage populaire a transformé deux fêtes religieuses catholiques, la fête de tous les saints, le 1er novembre, et le jour des défunts, le 2 novembre. Le mot Toussaint a perdu son sens religieux, il est devenu profane et son étymologie même n’est plus signifiante quand on l’emploi.

Cet usage populaire et profane de se souvenir des morts, d’honorer les morts, symbolisé par les chrysanthèmes, s’est répandu à partir du fleurissement des monuments aux morts le 11 novembre après la fin de la première guerre mondiale. Jour des défunts, souvenir des morts pour la France, souvenir des morts de chaque famille, floraison tardive des chrysanthèmes en ce début d’automne où les jours raccourcissent. Tout cela nous incline à la nostalgie et à la méditation sur le temps qui passe et la mort qui nous attend.

Nous sommes ici dans ce qu’on appelle le carré commun, qui accueille les corps des personnes mortes sans ressource ou sans famille. Carré commun. Commun au sens de bien commun, partagé par tous. Commun au sens d’ordinaire, d’égal pour tous. Non pas une fosse commune, collective, mais un carré commun où chaque personne a sa propre tombe. Chaque personne y est identifiée, et non pas anonyme. Singularité fondamentale de chaque personne humaine, mais le miroir de cette singularité, c’est la solitude. La singularité, mais aussi la solitude, c’est ce qui nous caractérise, depuis notre naissance jusqu’à notre mort. Mais nous sommes aussi des êtres sociaux, nous avons besoin des autres pour grandir et pour vivre en société. A cette solitude vient en contrepoint le collectif. Vous êtes membres du collectif des morts de rue, beau nom de collectif pour c’occuper de celles et ceux que la mort a saisi dans la solitude. Il n’est plus jamais de solitude pour ceux qui meurent. Ce qui nous émeut et ce qui nous rassemble ici, c’est cette solitude qui n’en est plus une.

Si je porte cette écharpe tricolore, c’est que dans la fonction de maire, il y a la fonction de représentant de la République. La République, garante des droits universels humains. La République, par ma présence , mais aussi par la vôtre, représentants des citoyennes et des citoyens, représentants de l’universalité des personnes humaines, la République, porteuse sur notre territoire des valeurs de la déclaration universelle des droits humains, la République est présente pour toutes celles et tous ceux qui vivent sur son sol. Egaux toutes et tous en droit et en dignité humaine.

Je vais dire le nom de ceux qui ont été enterrés ici, depuis un an

Mario DOS SANTOS GIL

Jean JENOUIL

Siros RASTI GHASWALDASHTI

Eugène HOFFMAN

Serge JACOB

Marie Gisèle TADDEI

Paul ROBERT

Robert SEBBAN

Erminio VIDUSSO

François REVERDY

Jean PICARD

Philippe LE JAOUEN

Michel ALIMONDO

Vincent SYLVESTRE-SOLSONA

Je vous remercie, vous qui, par votre présence, témoignez collectivement que toutes les personnes enterrées ici appartenaient à la communauté universelle des humains.

Pour ces cérémonies, autour des membres du collectif, étaient présents Mr Carroz, adjoint au Maire de Grenoble, Mr Spindler, Maire de La Tronche, mais aussi des personnes ayant connu certains défunts inhumés ici, ou bien sensibilisés à la problématique de la rue et/ou de l’isolement.

La presse locale était aussi présente (voir onglet radio/video/presse)